Onze grandes entreprises s’engagent avec l’OIT pour promouvoir l’insertion des travailleurs handicapés
L'emploi des personnes en situation de handicap reste encore un véritable défi dans la majorité des pays occidentaux. Onze grandes entreprises internationales sont devenues les premiers signataires de la nouvelle «Charte du Réseau mondial de l'OIT Entreprise & handicap » lors d'une cérémonie qui s'est déroulée au siège à Genève le 29 octobre dernier. Un pas vers une prise de conscience ? Une population de personnes handicapées en âge de travailler qui seraient selon les chiffres entre 785 à 975 millions de plus 15 ans d'âge.
Une dizaine de grands principes...
Si ce document n'engage que celui qui le signe, il reste néanmoins un signal fort pour de nombreux pays d'Asie ou encore l'Inde et l'Afrique. La Charte exprimant une détermination à promouvoir et inclure les personnes handicapées dans leurs opérations à l'échelle mondiale.
Un document fruit de plusieurs mois de travail et qui couvre toute une série de domaines. De la protection du personnel porteur de handicaps contre toute forme de discrimination jusqu'à rendre progressivement accessibles les locaux de l'entreprise et la communication interne aux employés avec un handicap.
Comme le souligne le Directeur général de l'OIT Guy RYDER, « Employer des personnes handicapées n'est pas seulement une cause moralement juste, c'est aussi bénéfique pour les entreprises. L'absence d'égalité des chances en matière d'emploi pour les personnes handicapées se traduit souvent par des vies de pauvreté et d'exclusion sociale »
Concluant que le respect de cette charte dont « le secteur privé fera preuve d'un véritable leadership en permettant aux personnes handicapées d'accéder à un travail productif et de vivre dignement »
Onze grandes entreprises internationales signataires
Les premiers signataires qui sont toutes de grandes sociétés internationales, auront pour cette charte un objectif supplémentaire celui d'être un moteur de cette nouvelle pensé de l'OIT en diffusant au niveau mondial celle d'un message d'inclusion pour les personnes en situation de handicap et être bénéfique pour les entreprises.
S'exprimant au nom des signataires, la présidente du comité de direction du Réseau, Wendy ORR de la Standard Bank, a déclaré : « Nous sommes fiers de figurer parmi les premières entreprises à signer la Charte des entreprises sur le handicap. C'est une nouvelle avancée pour montrer notre engagement en faveur de l'inclusion des personnes handicapées sur le marché du travail. Nous pensons, et nous en avons fait l'expérience, qu'une main-d'œuvre inclusive et diverse offre des perspectives aux employeurs, aux employés et à la société tout entière ». Exprimant le souhait de voir toutes les grandes entreprises d'autres grandes sociétés à nous rejoindre pour signer la Charte dans les prochains mois.
La Charte sera diffusée auprès des fédérations nationales d'employeurs et des réseaux nationaux entreprises & handicaps afin de promouvoir l'inclusion des personnes handicapées au sein de leurs membres, y compris les petites et moyennes entreprises (PME).
Un chemin encore très long pour un accès mondial au travail
Si la prise de conscience des États et du monde économique aura commencé avec l'OIT dés 1925, il aura fallu attendre 1955 et plus précisément 1983 pour que soit voté une recommandation pour encourager davantage l'action du gouvernement sur la question de la promotion de l'emploi et de l'égalité pour les personnes handicapées dans la formation des compétences et de l'emploi. De même, les principes d'égalité de traitement et l'égalité des chances sont devenus les principes sous-jacents dans le Code de pratique de l'OIT pour la gestion du handicap sur le lieu de travail (2002),
La Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées adoptée en décembre 2006 comprend les droits et les protections spécifiques, y compris celles liées à la formation des compétences et de l'emploi. Il appelle la fourniture d'un logement raisonnable afin que les personnes handicapées puissent participer pleinement à la sphère complète de la vie sociale et économique, y compris le travail.
Reste qu'aujourd'hui la diversité des pratiques économique et celle de la mondialisation n'ont pas amélioré la situation des salariés dans certains pays du monde comme l'Asie, l'Inde ou les pays en voie de développement comme en Afrique. Les salariés handicapés sont souvent les dernières préoccupations des gouvernements dans ces pays du monde. L'aspect économique, la rentabilité, et la main d'œuvre a bas coût restent les principaux arguments pour promouvoir leurs produire et envahir les marchés mondiaux.
Réseau mondial de l'OIT Entreprise & handicap
Créé en 2010, le Réseau fait office de médiateur et répond aux sollicitations de ses membres pour élaborer des outils, partager les connaissances et faciliter les réunions et les discussions entre entreprises sur les questions de handicap. Il conjugue les intérêts des mandants employeurs de l'OIT et ceux des entreprises multinationales.
Son comité de direction est composé de représentants de huit entreprises multinationales, d'une organisation mondiale de personnes handicapées et de deux organisations d'employeurs. Le Réseau a créé un outil d'auto-évaluation qui permet aux sociétés d'évaluer leurs performances dans un certain nombre de domaines concernant le handicap. Auquel il faut ajouter l'importance essentielle des personnes handicapées elles-mêmes, grâce à un partenariat avec l'Alliance internationale des personnes handicapées, un réseau d'organisations de personnes avec un handicap au niveau régional et mondial.
Deux grandes approches en Europe...
En Europe il existe aujourd'hui deux grands courantsi mis en place dont celui d'une législation anti-discriminatoire. Selon cette philosophie, les personnes handicapées sont aussi compétentes et productives que les autres, capables de concourir à l'emploi sur une base d'égalité. La discrimination est considérée comme l'explication de base de l'exclusion et du bas niveau d'insertion des personnes handicapées sur le marché du travail.
La ligne idéologique du Nord de l'Europe (Suède, Finlande, Danemark) privilégie non pas les obligations légales d'emploi, mais les politiques inspirées par des principes généraux d'égalité, de normalisation, d'intégration, qui constituent des objectifs politiques à atteindre.
D'une façon générale, la priorité est donnée dans les politiques à l'intégration des travailleurs handicapés dans le milieu ordinaire de travail. Mais les pays mettent en place des systèmes d'emploi protégé à l'exemple de la France, comme une alternative pour ceux des travailleurs ne pouvant pas accéder au marché ouvert se sont multipliés ces dernières années.
L'évolution des politiques nationales est passée de la prise en charge par l'État (elles sont nées pour protéger les invalides de guerre) à une approche orientée vers l'autonomie, comprenant tous les civils handicapés. Les stratégies actuelles comportent un changement dans la prise en compte du handicap vers la réadaptation au travail. L'intégration des personnes handicapées est aujourd'hui une question d'économie du pays plus que de bien-être. Les prestations d'invalidité représentant un coût social pour le budget de l'État.
Un pari loin d'être gagné en France, avec plus de 23 % de taux de chômage. Il y a certes les bons élèves souvent des grands groupes pour lequel l'obligation et devenue une nécessité économique, mais aussi plus facile. Reste que certains en France ont véritablement ouvert la voie commse le groupe Casino avec 10.7 % ou encore le Groupe Carrefour ou L'Oréal, ou bien la Société Générale même si cette dernière n'est pas signataire de la Charte. Reste aujourd'hui que les mauvais élèves existent y compris au sein de l'Etat avec l'Education nationale, exempté également du montant de sa contribution, mais plus de 60 % des entreprises n'ont toujours pas atteint le taux de 6 % requis par la loi.
Stéphane LAGOUTIÉRE
Publication : 02/11/2015