Enfant handicapé par la Dépakine l’état pourrait assumer l’indemnisation dans un premier temps ?
Alors que les boites de Dépakine affichent un sigle d’avertissement sur les dangers qu’ils comportent pour les femmes enceinte. Un excès de zèle dénoncé par le Comité National de l’Épilepsie. La ministre de la Santé Agnès BUZYN interrogé sur France Inter au sujet de la Dépakine de Sanofi et d'autres médicaments responsables depuis 1967, a reconnu que l’heure était désormais à l’heure des négociations entre l'État et Sanofi Aventis.
L'État discutera avec le groupe pharmaceutique Sanofi-Aventis sur les montants d'indemnisation face aux malformations et troubles de développement causés par le valproate, substance prescrite pendant un demi-siècle contre l'épilepsie et les troubles de l'humeur mais dangereuse pour les foetus, a annoncé le 25 juin 2018 la ministre de la Santé, Agnès Buzyn. Des malformations qui concernerait entre 2 150 à 4 100 enfants, et entre 16 600 a 30 400 enfants concernant les troubles neurodéveloppementaux
Agir avec rapidité…
Pour la ministre l’essentielle a telle insisté est que les familles ne soient pas confrontées à l’attente longue et difficile qu’implique souvent ce genre de situation. « On a évidemment les moyens, les discussions auront lieu (…) plutôt que les familles se retournent vers l'industriel, l'État met en place un fonds pour accélérer les choses, et que ça ne traîne pas. Et ensuite c'est à l'État de se retourner vers les personnes en faute, évidemment », a-t-elle déclaré.
Répondant a père l’interrogeant a la radio et dont son enfant est aujourd’hui handicapé à cause de ce médicament « Ce qui compte pour moi, et c'est l'urgence, c'est que ces familles d'abord connaissent le risque, et donc puissent se tourner vers l'Oniam (Office national d'indemnisation des accidents médicaux), et puissent être indemnisés », a expliqué Mme BUZYN. "C'est vraiment une situation épouvantable (...) C'est dramatique et j'imagine votre souffrance", a-t-elle souligné.
L'État devra faire tout la transparence…
Les données issues de l’Assurance maladie révèlent, précise la ministre de la Santé, « que les femmes qui ont pris de la Dépakine, mais également d’autres anti-épileptiques, ont des risques très importants d’avoir des enfants qui ont soit des malformations, soit des troubles du neuro-développement. Et c’est une étude qui montre que l’Etat veut faire toute la transparence sur cette affaire ».
Une transparence dont la présidente de l’association des victimes de la dépakine et sa présidente Marine MARTIN doute y compris après la réunion de vendredi dernier avec le ministère. « Ça faisait 2 ans qu'on attendait des chiffres officiels sur le nombre de victimes et la fourchette donnée ne nous étonne pas. (…) Je pensais aussi qu'on aborderait le fait que Sanofi refuse de participer aux réunions de l'Oniam et aux fonds d'indemnisation ».
Ce fonds a été budgété l'année dernière à 77M€. « Je suis effrayée, vu le nombre de victimes potentielles - 30.000 selon la fourchette haute - de la somme à payer par l'État. Sanofi ne veut pas payer, alors qu'on demande aux Français de se serrer la ceinture. La famille qui a porté plainte en 2008 a obtenu en appel la condamnation de Sanofi à payer 3 millions d'euros. Multipliez ces 3 millions par 30.000 personnes : ça représente des milliards d'euros. On ne peut pas laisser l'État assumer seul. Il faut que Sanofi participe. J'ai appris que Sanofi a réagi en affirmant qu'il n'y avait pas eu de discussion pour l'instant. Je suis déjà satisfaite qu'ils réagissent, car ça n'arrive pas souvent, mais ça ne va pas dans le sens de ce que dit la ministre. Je me demande si celle-ci ne s'est pas trop avancée ».
Valproate interdit à certaines femmes…
Tous les médicaments au valproate sont aujourd'hui interdits aux femmes enceintes et en âge de procréer, sauf exception dans des cas d'épilepsie particuliers. Une situation dénoncée le Comité National de l’Épilepsie qui regroupe 19 associations de lutte contre l’épilepsie et qui s’interroge sur la nécessité d’un tel excès de zèle a posteriori ? mais aussi d’une solution de facilité pour s’affranchir d’une information nécessaire, mais insuffisante jusqu’à aujourd’hui ? Interdire pour ne pas avoir à prendre en charge un accompagnement coûteux ? Cacher le vrai scandale, celui de la prise en charge désastreuse de l’épilepsie aujourd’hui dans notre pays ?
Pour l’association, la volonté de protéger de potentiels enfants à naître doit-elle porter atteinte à la santé de milliers de petites filles, jeunes filles et femmes, qui ne peuvent pas se passer du valproate, et qui sont en capacité soit de mener une grossesse encadrée par un neurologue et un obstétricien, soit de choisir ne pas avoir d’enfants, soit qui n'ont pas de raison de faire usage d'une contraception active en raison de leur lourd handicap (les jeunes femmes polyhandicapées en établissement, incapables d'une relation sexuelle consentie). Priver les petites filles de ce traitement risque de créer des situations de handicap futures car les crises en elles-mêmes peuvent être toxiques, surtout dans l’enfance.
Stéphane LAGOUTIÉRE
Sources : Ministère de la Santé / France Inter 2018
Publication : 26/06/2018