Dépenses sociales des départements en 2022 : Une hausse de 2,7 % en 2022 et de 5.4 % pour le handicap
Comme chaque année, l’ODAS décortique et analyse l’évolution des dépenses sociales et médico-sociales des départements avec le concours d’un échantillon représentatif de 49 départements. Après une année 2021 atypique l’année 2022 témoigne de tendances très contrastées. Car au-delà de la hausse de 2,7 % -qui correspond à la fois à la dépense réelle des collectivités et à leur "charge nette", une fois défalquées les dotations de l'Etat-, de nombreux postes de dépenses ont connu une accélération plus marquée. Des dépenses d’un niveau équivalent voire supérieur à celui de l’inflation dans trois domaines, selon le dernier rapport l’ODAS.
Les dépenses globales
En 2022, la dépense nette d’action sociale départementale s’élève à près de 41,5 Md€, soit une augmentation de 2,7 % par rapport à 2021 (+ 1,1 Md€). Après la quasi-stabilité de la dépense nette en 2021 (+ 0,4 %), l’évolution de la dépense en 2022 cache deux mouvements importants et très contrastés : la dépense relative au revenu de solidarité active baisse de près de 0,5 Md€ tandis que l’ensemble des autres dépenses augmentent de 1,6 Md€. L’essentiel de cette augmentation provient des multiples revalorisations salariales dans le cadre de l’application du Ségur de la santé et de ses extensions successives ainsi que des mesures concernant les services d’aide à domicile. Les concours de l’État pour le financement des allocations ont augmenté au même rythme de 2,7 % soit plus de 230 M€. Représentant une augmentation de la charge nette, de 32,6 Md€ (+ 860M€).
Charge nette : De quoi s’agit-il ?
La dépense sociale et médico-sociale nette, soit la dépense défalquée des recettes (récupérations d’indus, participations des usagers, remboursements à d’autres départements ou à l’assurance maladie…) ne traduit pas la charge financière que représente l’action sociale pour les départements. En effet, parmi les dotations versées par l’État, certaines sont explicitement affectées au financement des allocations. Ainsi la CNSA participe au financement de l’Allocation Personnalisé à l’Autonomie (APA) et de la Prestation de Compensation du Handicap (PCH). Tandis qu’une part de la dépense du Revenu de Solidarité Active (RSA) est couverte par le transfert d’une part de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) et par le versement du Fonds de mobilisation départemental pour l’insertion (FMDI). La charge nette des départements est donc obtenue en retranchant ces dotations de la dépense nette. Cette charge nette représente le poids réel des dépenses sociales et médico-sociales pour les départements.
Handicap : En hausse de 5,4 %...
La hausse des dépenses sociales des départements a été limitée en 2022 à 2,7 %, soit moins que l'inflation. Cette modération cache néanmoins des augmentations beaucoup plus marquées dans certains secteurs, comme celui du handicap, en hausse de 5,4 %. En 2022, la dépense nette en faveur des personnes en situation de handicap a augmenté de + 5,4 % par rapport à 2021 pour atteindre 8,71 Md€. Cette évolution est largement due à l’augmentation de la Prestation de compensation du handicap (PCH), de + 11,8 %, deux fois plus importante que l’année précédente. Le concours de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) dédié à la PCH a augmenté de + 33,3 %, soit une augmentation de + 200M€. Il en résulte que la charge nette, de près de 7,9 Md€ augmente moins que la dépense nette : + 3,3 %.
Une hausse qui malgré tous reste largement insuffisante au vu du cout de l’inflation provoquant ainsi une baisse du pouvoir d’achat des personnes en situation de handicap. Rappelons que le montant de l’Allocation aux Adultes Handicapés (AAH), reste largement en dessous du seuil de pauvreté européen. l’AAH à taux plein et revalorisé à 971,37€ par mois depuis le 1er avril 2023, contre de 956,65€ auparavant. Soit une augmentation de 1,6 % du montant de l’AAH soit 14,72€.
A noter enfin que l’on observe une faible diminution du nombre de bénéficiaires (- 0,3 %) par rapport à 2021, mais une augmentation de la dépense de 4,3 %, qui s’explique par les revalorisations salariales.
Protection de l'enfance : Hausse de 6,9 %...
En 2022, la dépense nette de protection de l’enfance a fortement augmenté (+ 6,9 %). Elle atteint désormais 8,86 Milliards d’euros contre 8,29 Md€ l’année précédente. Le nombre de jeunes pris en charge évoluant peu (+ 1,4 % d’enfants et jeunes accueillis, - 0,7 % accompagnés suivis à domicile), cette progression est essentiellement liée aux revalorisations salariales des personnels des établissements et services ainsi que des assistants familiaux. Quelques départements signalent cependant des ouvertures de places en établissements ou en accueil à domicile. Une prise en charge de l’ensemble des mineurs étant passé de 145 000 à 146 800 soit une progression de +1. 6 %
A noter que le cout dépenser chaque année, concernant la protection de l’enfance des mineurs non accompagnés c’est-à-dire des jeunes de moins de 18 ans qui n'ont pas la nationalité française et se trouvent séparés de leurs représentants. Les départements qui ont effectivement, prise en charge plus de 2 300 mineurs supplémentaires au 31 décembre 2022.
Personne âgée dépendante…
En 2022, la dépense nette en faveur des personnes âgées dépendantes progresse de 270 M€, soit + 3,7 %, pour s’établir à 7,65 Md€. L’allocation personnalisée d’autonomie (APA) en représente 85 %. Le concours de la CNSA au titre de l’APA est stable (+ 10 M€), ce qui conduit à une évolution de la charge nette de + 5,3 % par rapport à l’année précédente. Si l’on détaille les principales prestations, on constate que c’est l’APA à domicile qui présente l’augmentation la plus importante : + 5,1 %, alors que le nombre de bénéficiaires est stable.
L’augmentation s’explique, selon le rapport, notamment par les revalorisations salariales. Une augmentation conséquente des tarifs horaires est bien sûr invoquée, sous l’effet de l’application de l’avenant 43 et du tarif plancher (cf supra). Par ailleurs, une aggravation du niveau de perte d’autonomie des bénéficiaires de l’APA à domicile, nécessitant des plans d’aide plus étoffés, est souvent avancée. Mais cette augmentation est limitée par les difficultés de recrutement des SAAD qui a un impact sur la mise en œuvre des plans d’aide.
RSA : Une baisse de 2,3 % de bénéficiaires
En 2022, la dépense nette s’élève à 10,6 Md€, en diminution de 4,3 % par rapport à l’année précédente, soit près d’un demi-Milliard. Pour la deuxième année consécutive, le nombre d’allocataires diminue de 2,3 % soit un effectif passé de 1 632 900 en 2021 à 1 595 300 en 2022. Une charge nette diminue, passant de 5,5 Md€ à 5 Md€, le montant des concours de l’Etat étant similaire à celui de l’année précédente. Une situation qui s’explique en partie par la situation de l’emploi. En effet, comme l’an passé, de nombreux secteurs peinent à recruter : tourisme, restauration, hôtellerie, transport, services à la personne.
A noter que les disparités restent importantes entre les départements et les emplois auxquels accèdent les allocataires du RSA sont souvent des emplois précaires et peu qualifiés, ce que confirme une enquête de la DREES parue en janvier 2023. Par ailleurs, nombre de bénéficiaires du RSA n’ont pas la possibilité d’être accompagnés selon leurs besoins : dans la même étude, trois allocataires interrogés sur cinq signalent ne pas avoir eu accès en 2018 à un accompagnement social ou professionnel.
Un arbre qui cache la forêt…
En conclusion, selon l’ODAS, « cette étude portant sur l’année 2022 témoigne de tendances très contrastées ». Car si la hausse globale des dépenses est limitée, c'est grâce à une embellie sur le front de l'emploi, qui a entraîné une baisse de 2,3 % du nombre de bénéficiaires du Revenu de solidarité active (RSA), et de 4,3 % des montants versés. « Les dépenses pour la protection de l'enfance ont ainsi augmenté de 6,9 %, et celles pour les personnes handicapées de 5,4 %. Les frais de personnel ont également crû de 6,1 %, notamment du fait d'une revalorisation de 3,5 % du point d'indice en juillet dernier, et de plusieurs revalorisations décidées par le gouvernement pour les salariés du médico-social. Et encore, cette hausse aurait été plus importante si de nombreux postes n'étaient pas restés vacants, faute de candidats dans un secteur qui souffre d'un manque chronique d'attractivité », souligne l'ODAS.
Stéphane LAGOUTIERE
Sources : ODAS 2023
Publication : 28/06/2023