L’Amérique rend hommage à ses blessés de guerre, et a ses gueules cassées parfois sans avenir
En guerre depuis plusieurs années à la fois contre le terrorisme, mais aussi notamment en Irak, en Afghanistan avec plus de 19 000 en 13 ans de conflit, a décidé d’honorer ces milliers de soldats revenus du front parfois totalement oublié voir abandonné a leurs propres sorts. Un mémorial inauguré le 5 octobre dernier, par le Président américain, Barack OBAMA, consacrant ces soldats aux les blessures, visibles et invisibles. Un processus qui aura prit beaucoup de temps pour sa reconnaissance, plus de 16 ans.
Situé près du Congrès américain à Washington, sous la forme d’une fontaine en forme d'étoile comme sur le drapeau américain, du granit et du verre pour symboliser la «force et la vulnérabilité», dans lequel une flamme brule en permanence. Le président qui dans son discours a souligné la valeur des soldats qui ont perdu en se battant une main, une jambe ou la «tranquillité d'esprit».
"Les gens pensent qu'il y a les soldats qui sont tués et les soldats qui survivent, mais il y a en fait beaucoup de soldats qui sont blessés et gardent ces blessures toute leur vie", explique à l'AFP Christopher NEIWEEM, revenu d'Afghanistan avec des problèmes pulmonaires, et chargé des questions juridiques à l'association des anciens combattants d'Irak et d'Afghanistan (IAVA).
Un véritable tabou…
Des blessures de guerre qui représentent au cœur des institutions et administrations américaines un véritable tabou. Pour preuve, en 1943 le général Patton avait giflé un soldat qui ne présentait pas de blessure physique, mais avait dû être hospitalisé pour «fatigue au combat». Les symptômes de la dépression, de l'angoisse ou des accès de colère, n'ont été reconnus par les psychiatres américains sous le nom de PTSD qu'en 1980.
Une situation qui explique selon Christopher NEIWEEM, que ce monument a mis beaucoup de temps, en raison notamment de la longueur du processus pour sa reconnaissance plus de 16 ans.
Un retard, aussi peut-être lié au fait que les blessés «sont un peu oubliés. C'est beaucoup plus facile de comprendre l'idée d'un soldat qui est allé à la guerre et qui est mort. Alors que penser à un soldat rentré du combat sans jambe ou sans bras, on est un peu moins à l'aise parce que chaque fois que vous voyez cette personne, elle vous rappelle le coût de la guerre», suggère Yochi DREAZEN, auteur du livre The invisible front: love and loss in an era of endlesswar, sortie le 7 octobre dernier au Etats-Unis.
Des souffrances du corps et de l’esprit…
Un mémorial qui «célèbre le courage et le sacrifice» des anciens combattants blessés qui sont plus de trois millions encore en vie aux États-Unis souffrent «de handicaps physiques, mais aussi "invisibles" comme les troubles du stress post-traumatique» souligne la philanthrope Lois POPE, à l'initiative du projet avec l'ex-ministre des anciens Combattants, Jesse BROWN.
Se sont ainsi plus de 52 000 soldats qui sont revenus blessés physiquement d'Irak ou d'Afghanistan depuis les attentats du 11 septembre 2001 (pour quelque 6800 morts), auxquels il faut ajouter des centaines de milliers, voire davantage, de soldats souffrant de ces blessures «invisibles». Selon le ministère des anciens Combattants, entre 11 et 20 % (contre 7 à 8 % dans la population normale) d'anciens soldats d'Irak ou d'Afghanistan souffrent de PTSD.
Un monument nécessaire a l’heure ou la présence américaine face a la lutte contre le terrorisme et le nombre des autres conflits, pour des d'invalides dont le nombre surpassera d'autant plus celui des morts que la tendance actuelle dans les conflits est de blesser plutôt que de tuer l'ennemi pour l'affaiblir.
M. DREAZEN lui «doute» cependant que ce mémorial soit vraiment dédié aux «blessures émotionnelles», qui seront pourtant «là pour des décennies, car elles peuvent apparaître seulement 5, 10 ou 15 ans après la fin de la mission». Près de 300 000 anciens combattants de la guerre du Vietnam recevaient encore en 2011 des allocations au titre d'un PTSD.
Une prise en charge loin d’être satisfaisante…
Mais un monument qui faut-il espérer ne masquera pas le vrai problème celui de la prise en charge de ces blessés de guerre, qui continue à être parfois totalement abandonnés a leurs propres sorts. Selon M. DREAZEN. Après la guerre civile (1861-65) et la Première Guerre mondiale, ces soldats «ont dû s'organiser et manifester pour obtenir les allocations auxquelles ils avaient droit», a rappelé lui-même M. Obama. Et l'an dernier, les hôpitaux militaires où ils sont soignés ont été secoués par un scandale de listes d'attentes liées à plusieurs décès. «Ce n'est pas dit intentionnellement, mais c'est beaucoup plus facile d'aller à un mémorial et de se sentir bien avec soi-même (...) que de penser à ces questions difficiles», conclut-il
La Rédaction
Publication : 20/10/2014